La "découverte" d’Aspect et de son équipe consiste en une expérience réalisée en en 1981, 1982 et 1988 [1]. David Bohm a donné une interprétation particulière de cette expérience. Selon lui, puisque la physique quantique fonctionne sans notion d’espace ou de distance, la matière n’est que de l’information, si bien que l’univers peut être comparé à un hologramme.
Les faits d’abord : l’expérience de 1981 a montré que les particules sub-atomiques comme les photons et les électrons d’un même système (deux particules issues d’une division ou d’une interaction précédente) sont capables de communiquer avec leur doublon [2] indépendamment de la distance qui les sépare [3]. Chaque particule réagit au comportement de l’autre comme si elles ne faisaient encore qu’une. Le moyen de cette communication (au moins deux fois plus rapide que la lumière) pose un problème : il est indétectable. Cette communication viole la loi mathématisée par Einstein selon laquelle aucune masse [4] ne peut voyager plus rapidement que la vitesse de lumière.
Son expérience a été reproduite à grande échelle en 1998 par les physiciens de l’université de Genève, dirigée par Nicolas Gisin, soit un système d’expérimentation s’étendant sur 30 km [5]. Chacun des photons se déplaçait à l’intérieur d’une fibre optique avant d’atteindre un miroir semi-réfléchissant (qui peut réfléchir ou être traversé). Non seulement les photons réagissaient de la même manière au lieu de réagir de manière aléatoire, mais ils réagissaient instantanément, ce qui signifie, vu la distance et la sensibilité des appareils de mesure, qu’une information était transmise au moins dix millions de fois plus vite que la lumière [6]. Cette expérience confirme celle d’Alan Aspect affirme une nouvelle fois la réalité du paradoxe EPR [7]. Il y a trois interprétations possibles de ce phénomène :
La mesure induit le phénomène observé, il n’y a rien à expliquer (interprétation de Copenhague).
Un signal peut dépasser la vitesse de la lumière.
Les particules sont aussi des ondes et les ondes ne sont pas séparées (théorie de la non-localité de la physique quantique).
C’est la troisième hypothèse qui a été retenue, violant de ce fait les inégalités de Bell [8] et la prétention des théories déterministes à expliquer l’univers selon la simple loi de la causalité. Une quatrième interprétation a toutefois été imaginée par le physicien David Bohm, (professeur du Birkbeck College de l’Université de Londres) ; il pense que l’expérience d’Aspect implique que l’espace, la causalité et la matière, tout ce qui définit la réalité dans laquelle nous vivons, est une vue de l’esprit, une illusion. Pour David Bohm, le monde fonctionne de manière analogue à un hologramme. Pour comprendre pourquoi Bohm fait cette affirmation, il est nécessaire de rappeler ce qu’est un hologramme.
Un hologramme est une photographie tridimensionnelle faite à l’aide d’un laser. Pour faire un hologramme, l’objet à photographier doit être d’abord baigné dans la lumière d’un rayon laser. Alors un deuxième rayon laser (qui peut être de même source) rebondit sur la lumière du premier reflétée par l’objet et le modèle d’interférence résultant (le secteur où les deux rayons laser se mélangent) est capturé sur le film [9]. Quand le film est développé, il ressemble à un remous sans signification de lignes légères et sombres. Mais aussitôt que le film développé est éclairé par un autre rayon laser, une image tridimensionnelle de l’objet original apparaît.
Le fait important est que le relief est intégralement conservé : en particulier l’observateur pourra voir, en déplaçant son œil, des parties de l’objet les plus proches de lui venir en masquer d’autres situées à l’arrière-plan [10].
La tridimensionnalité de telles images n’est pas le seul point remarquable. Si un hologramme d’une rose est coupée dans sa moitié et est ensuite éclairée par un laser, on pourra retrouver dans chaque moitié l’image entière de la rose. En effet, même si les moitiés sont divisées de nouveau, chaque morceau de l’image (ou du film) contiendra toujours la version plus petite mais intacte de l’image originale. À la différence d’une photographie standard, chaque partie d’un hologramme contient l’ensemble de l’information possédée par la totalité. Cette caractéristique du "tout dans chaque partie" fournit une voie entièrement nouvelle pour comprendre et pour gérer l’ordre et l’organisation.
Dans la plus grande partie de son histoire, la science occidentale a travaillé à améliorer la façon de comprendre un phénomène physique, de la grenouille ou l’atome, en le disséquant et en étudiant chacune de ses parties préalablement définies. Pour David Bohm, l’hologramme nous enseigne que plusieurs choses dans l’univers pourraient ne pas se prêter à ce type d’approche. Si nous essayons de démonter quelque chose construit holographiquement, nous n’arriverons pas à déterminer les pièces qui le constituent, nous obtiendrons seulement des "touts plus petits".
Cette idée permet de comprendre la découverte d’Aspect. Bohm croit que la raison pour laquelle les particules sub-atomiques sont capables de rester en contact entre elles indépendamment de la distance qui les sépare n’est pas parce qu’ils enverraient un mystérieux signal dans les deux sens (plus rapide que la vitesse de la lumière), mais parce que leur séparation est une illusion. Il soutient qu’à un niveau plus profond de la réalité, de telles particules ne sont pas des entités individuelles, mais qu’elles sont des extensions de la même chose fondamentale.
Pour permettre aux non-scientifiques de mieux visualiser ce que cela signifie, Bohm propose l’image suivante. Imaginez un aquarium contenant un poisson. Imaginez aussi que vous êtes incapables de voir l’aquarium directement et que votre seule source de connaissance provient de deux caméras de télévision, l’une posée en face de l’aquarium, l’autre sur le côté. En regardant les deux moniteurs, vous pourriez supposer que le poisson sur chacun des écrans est une entité individuelle. Parce que les caméras seraient installées selon des angles différents, chacune des images seraient légèrement différente. A force d’observer le deux poissons, vous vous rendez compte qu’il y a un certain rapport entre eux. Quand l’un des deux tourne, l’autre tourne également, selon un angle légèrement différent, instantanément. Quand l’un montre se visage de front, l’autre se positionne de côté. Si vous restez inconscients de la pleine portée de la situation, de la différence entre ce qui vous est donné à voir et ce qui est, vous pourriez conclure que les poissons communiquent instantanément entre eux. Ceci, dit Bohm, est précisément ce qui se passe entre les microparticules dans l’expérience d’Aspect. La connexion apparente, plus-rapide-que-la-lumière, entre ces particules devrait nous indiquer plutôt qu’il existe un niveau plus profond de réalité duquel nous sommes privés et dans lequel ces particules ne sont pas séparées. C’est simplement déplacer à un niveau plus complexe, plus réel aussi, l’analogie de l’aquarium.
Bohm ajoute que nous voyons les objets comme des microparticules, comme séparées l’une de l’autre, parce que nous ne voyons seulement qu’une partie de la réalité. De telles particules ne sont pas "des parties" séparées, mais les facettes d’une unité sous-jacente, semblable à un hologramme. Cette unité serait proprement indivisible, comme pour l’exemple de l’hologramme fait à partir d’une rose. Tout objet de la réalité physique serait compris dans des eidolons, l’univers lui-même serait une projection, un hologramme. En plus de sa nature fantômatique, un tel univers posséderait d’autres particularités, difficiles à saisir pour nous qui vivons au niveau de l’illusion (et qui y avons adapté nos modes de pensée), mais répondant somme toute aux attentes profondes de l’homme : celles de l’unité et de la cohérence, celle de l’explication dernière de toute chose [11].
Si la séparation apparente des particules est illusoire, cela signifie qu’à un niveau plus profond de la réalité toutes les choses de l’univers sont connectées en permanence. Le seul problème reste à définir ce que sont ces choses, ces eidolons : est-ce des couples, des pairs, des opposés, des familles d’objets, des règnes (végétal, animal, humain…), des planètes ou n’y a-t-il qu’un seul objet : l’univers entier ?
Les électrons d’un atome carbonique dans le cerveau humain sont connectés aux particules sous-atomiques de chaque saumon qui nage, de chaque cœur qui bat et de chaque étoile qui miroite dans le ciel. Tout est profondément pénétré du Tout. Bien que la nature humaine puisse rechercher à catégoriser, à classer et subdiviser, les phénomènes divers de l’univers, toutes les divisions sont artificielles et l’ensemble que compose la nature étudiée est en fin de compte a seamless web [12]. Dans un univers holographique, même le temps et l’espace ne pourraient plus être vus comme principes de base, parce que des concepts comme l’emplacement et la mesure s’écroulent.
Dans un univers dans lequel rien n’est vraiment séparé d’autre chose, le temps et l’espace tridimensionnel, comme les images du poisson sur le moniteur de contrôle, doivent aussi être vus comme les projections d’un ordre et d’une unité plus profonds. Cette réalité sous-jacente peut être conçue comme une sorte de superhologramme dans lequel le passé, le présent et l’avenir existent simultanément. Cela suggère que si l’on nous donnait les outils appropriés (dans l’hypothèse où ces outils puissent exister), nous serions capables d’atteindre au niveau superholographique les scènes du passé… et de l’avenir.
Ce que le superhologramme pourrait contenir d’autre (que notre univers) reste une question ouverte. Il reste cependant permis de penser, dans l’état actuel des connaissances, que ce superhologramme soit la matrice qui a donné naissance à notre univers : à la moindre particule qui a été, qui est et qui sera, à chaque configuration possible et à toutes les formes d’énergie, aux flocons de neige comme aux quasars, aux baleines bleues comme aux rayons gamma… Il doit être vu comme un superentrepôt cosmique de "Tout ce qui Est."
David Bohm admet que nous n’avons aucun moyen de savoir s’il existe un "mensonge caché" dans le superhologramme, dont notre univers serait l’expression. Nous n’avons ni argument pour l’affirmer, ni pour l’infirmer. On peut juste accroître notre méfiance à l’égard d’une "vérité ultime" et envisager que ce "niveau superholographique" ne soit qu’une simple scène d’un ensemble plus vaste, de ce que certains appellent l’Univers Global [13]. Le développement de ces "univers globaux", par rapport auxquels les univers contenus seraient semblables à des hologrammes, pourrait être infini. La création d’une réalité virtuelle, tridimensionnelle, holographique, à partir d’Internet par exemple, pourrait être également considérée comme un univers illusoire contenu par "notre" univers global.
**Karl Pribram et le cerveau holographique
Bohm n’est pas le seul chercheur à avancer cette théorie. D’autres chercheurs ont découvert dans leurs travaux des indices forts (à défaut d’une preuve flagrante) que l’univers est un hologramme.
Travaillant indépendamment dans le domaine du cerveau, le professeur Standford et le neurophysiologiste Karl Pribram [Voir Karl H. Pribram, Brain and behaviour, Penguin Books, Hammondsworth, 1969.]sont aussi persuadés de la nature holographique de réalité. Pribram a tiré du modèle holographique une explication permettant de résoudre l’énigme du stockage de la mémoire dans le cerveau. Pendant des décennies, de nombreuses études sur le sujet se sont montrées plutôt limitées dans leurs conclusions. Elles partaient toutes de la prémisse que la mémoire était localisée - localisable dans un ensemble de neurones (une partie du cerveau). Les progrès de la recherche ont permis de montrer que la mémoire était dispersée partout dans le cerveau, que si elle sélectionnait telle partie dans son activité, chaque autre partie du cerveau (y compris de l’autre hémisphère) contenait l’ensemble des informations (y compris des fonctions du cerveau).
Cette "duplication" de l’information existe à l’état latent et il ne se manifeste que dans des situations particulières. On a ainsi pu opérer, il y a quelques années, une petite fille dont on a retiré l’un des deux hémisphères cervicaux. Aucune information (mémoire) ni aucune fonction (motrice, langage, spatiale, etc.) n’a été modifiée. L’activité du cerveau s’est concentré dans l’hémisphère restant, avant que l’autre ne repousse (ce fait médicale a été privilégié dans les médias puisque c’était là le but de l’opération). Le cerveau une fois reconstitué en entier, il s’est ensuite réparti les tâches et les fonctions (et les informations) se sont de nouveau divisées dans les deux hémisphères.
Dans une expérience portant sur des points de repérage (quadrillage du cerveau), datant des années 1920 et effectué par le spécialiste du cerveau Karl Lashley, on a pu constater que peu importait quelle partie du cerveau d’un rat était retirée, l’ablation était incapable de supprimer son souvenir de la manière dont il devait exécuter des tâches complexes (apprises auparavant). Si l’expérience a été "rangée dans un tiroir", c’est parce qu’elle posait le problème suivant que personne n’était capable d’inventer un mécanisme capable d’expliquer ce curieux "tout dans chaque partie", qui est la nature du stockage de la mémoire. L’expérience remettant en cause l’ensemble des conventions et des mécanismes établis par la biologie (de l’époque), elle devait attendre des chercheurs comme Pribram pour refaire surface avec une théorie adéquate.
Dans les années 1960 en effet, Pribram rencontre le concept d’holographie et comprend ce qu’il avait d’abord constaté - avec l’ensemble du monde scientifique - dans la recherche sur le cerveau. Pribram pense que les mémoires sont codées, non pas dans les neurones ou dans de petits regroupements de neurones, mais dans des modèles d’impulsions nerveuse, entrecroisées dans le cerveau entier, de la même manière que dans les modèles de laser une interférence légère entrecroise le secteur entier d’un morceau de film contenant une image holographique [14]. Autrement dit, Pribram croit que le cerveau est un hologramme.
La théorie de Pribram explique aussi comment le cerveau humain peut stocker tant de souvenirs (et des souvenirs complexes, précis) dans si peu d’espace (et pouvoir les rappeler à volonté, les associer, etc.). Pour l’anecdote, il a été évalué que le cerveau de l’homme avait la capacité pour retenir quelque chose de l’ordre de 10 milliard de "particules" d’information pendant la durée d’une vie moyenne, grossièrement la même quantité d’information contenue dans cinq collections de l’Encyclopedia Britannica. Cela signifie simplement qu’on ne connaît pas actuellement les limites de la mémoire du cerveau humain (d’où l’intérêt des études sur les génies de la mémoire, tels que les autistes surdoués). Or, les hologrammes possèdent une capacité étonnante pour stocker de l’information : simplement en changeant l’angle de l’un des deux lasers qui frappent en une partie le film photographique, il est possible d’enregistrer beaucoup d’images différentes sur la même surface. Il a été démontré qu’un centimètre cube de film (holographique) peut tenir bien 10 milliards de particules d’information. C’est ici que l’anecdote devient coïncidence…
La technique de l’hologramme sert également d’explication à notre capacité de récupérer rapidement et indépendamment l’information dont nous avons besoin. Si un ami vous demande de lui dire ce qui lui vient à l’esprit quand il dit le mot "zèbre", vous ne devez pas maladroitement auparavant trier un fichier alphabétique gigantesque pour parvenir à une réponse. Intuitivement, nous savons bien que nous ne raisonnons pas comme ça [15]. Au lieu de cela, nous associons "rayé", "pareil à cheval" et "animal originaire d’Afrique", sans effort, en situant parfaitement ces mots et n’ayant conscience de rien d’autre. En effet, une des choses les plus étonnantes dans le processus de pensée est que chaque partie d’information semble immédiatement corrélée à chaque autre. Plus précisément, ces associations ne sont pas données une fois pour toutes, apprises comme des définitions, mais elles sont réinventées et peuvent être détaillées à volonté. Cela dénote une structure très souple de ce mécanisme de corrélation. Cette facilité de "glisser" d’une information à une autre est justement une propriété de l’hologramme - qui pourrait donc servir de modèle d’explication (à défaut de l’explication même). Dans un hologramme, en effet, chaque partie est "infiniment" connectée aux autres, comme nous l’avons déjà expliqué. C’est de tout les systèmes de corrélation et de mutualité, le système aujourd’hui le plus "sensitif" et le plus "performant" [16] ; il est de tous celui qui se rapproche le plus du fonctionnement du cerveau.
Le stockage de mémoire (souvenirs) n’est pas la seule énigme neurophysiologique qui devient plus compréhensible à la lumière du modèle du cerveau holographique de Pribram. Un autre problème, et non des moindres, est celui-ci : comment le cerveau est-il capable de traduire l’avalanche des fréquences qu’il reçoit via les sens (les vibrations, les influx nerveux, les fréquences de sons, de la lumière visible…) dans le monde concret de nos perceptions (avant de les trier et de les reconnaître). Le codage et le décodage des fréquences sont précisément ce qu’un hologramme fait le mieux. Un hologramme fonctionne comme une sorte de lentille (un dispositif de traduction capable de convertir une tâche apparemment sans signification de fréquence en une image logique). Pribram pense que le cerveau comprend aussi une lentille et utilise les principes holographiques pour convertir mathématiquement les fréquences qu’il reçoit par les sens en un monde intérieur de perceptions (les sensations deviennent perceptions). Un ensemble de preuves (de processus neurologiques décrits et avérés) suggère que le cerveau utilise les principes holographiques pour exécuter ses opérations.
La théorie de Pribram a trouvé un appui chez d’autres neurophysiologistes, tel que le chercheur argentin-italien Hugo Zucarelli. Ce dernier a étendu le modèle holographique au monde des phénomènes acoustiques tels qu’ils pouvaient être reçus et analysés par le cerveau. Rendu perplexe par le fait que les gens pouvaient placer la source de sons sans déplacer leur tête, même s’ils possédaient seulement l’audition d’une oreille [17], Zucarelli découvrit que les principes holographiques pouvaient expliquer cette capacité. Zucarelli a également développé la technologie du son holophonique, un système d’enregistrement capable de reproduire des situations acoustiques avec un réalisme exceptionnel.
La théorie de Pribram est que notre intelligence construit la "vraie" réalité en tenant compte de l’origine du domaine de fréquences. Sa théorie a reçu de nombreux appuis expérimentaux depuis sa conception. a aussi reçu. Il a été constaté que chacun de nos sens était sensible à une gamme beaucoup plus large de fréquences que ce que l’on avait jusqu’ici soupçonné. Les chercheurs ont découvert, par exemple, que nos systèmes visuels étaient sensibles aux fréquences sonores, que notre sens de l’odorat dépend de ce qu’on appelle communément les "rayons cosmiques" (les fréquences provenant du cosmos), et que même les cellules de nos corps sont sensibles à une large gamme de fréquences. De telles découvertes suggèrent que ce soit seulement dans le domaine holographique de conscience que telles fréquences puissent être triées et transformées en perceptions conventionnelles.
Le paradigme holographique
Mais l’aspect le plus intéressant du modèle holographique de Pribram appliqué au cerveau est ce qui arrive quand il est réuni avec la théorie de Bohm. Si le "béton" du monde est pas une apparence de « béton », s’il est une réalité de second ordre, construite par nos sens et notre esprit, s’il est une tache holographique de fréquences, si le cerveau est un hologramme qui sélectionne les fréquences et les transforme mathématiquement en perceptions "concrètes", qu’est-ce que devient la réalité objective ? Elle cesse d’exister.
Comme les religions de l’Orient l’ont soutenu longtemps, le monde matériel est une mâya, une illusion, et bien que nous puissions penser que nous sommes des êtres physiques se déplaçant par un monde physique, cela aussi est une illusion. Nous ne serions que des "récepteurs" flottant dans un océan kaléidoscopique. Nous flotterions une fréquence particulière que nous extrayons de cette océan et que nous transformerions en réalité physique. La réalité physique elle-même ne serait qu’un canal parmi beaucoup d’autres (d’autres réalités en somme) extraits du Superhologramme.
Cette image de réalité, basée sur la synthèse de la théorie de Bohm avec celle de Pribram, porte le nom de paradigme holographique. Bien que beaucoup de scientifiques l’aient salué avec scepticisme, il en a galvanisé d’autres. Un petit groupe de chercheurs en forte croissance pense que ce paradigme pourrait être le modèle le plus précis qu’on ait actuellement de la réalité. Ce paradigme pourrait servir de base à une science de la réalité.
Partant de là, certains croient pouvoir ainsi résoudre d’autres mystères de la science. L’un de ces mystères est celui du paranormal : est-il scientifique ? doit-il être inscrit à l’ordre des phénomènes naturels ? Certains expériences ont constaté qu’il existait bien un "paranormal" (télépathie, voyance, guérison miraculeuse…), mais de nombreuses autres ont prouvées que ce phénomène n’était ni répétitif, ni prédictible [18]. Avec le paradigme holographique, le paranormal devient compréhensible, il devient une partie de la nature. De nombreux chercheurs, y compris Bohm et Pribram, ont noté que beaucoup de phénomènes parapsychiques pouvaient être ainsi résolus [19]. Dans un univers dans lequel l’intelligence individuelle est en réalité indivisible, les parties plus grandes de l’hologramme sont connectées avec l’infiniment petit - avec tout l’infiniment petit. Ainsi, une faculté psi comme la télépathie seraient simplement le signe d’une connexion (éphémère) au niveau holographique.
Ceci une fois accepté comme hypothèse, il devient plus facile de comprendre comment l’information peut voyager de l’esprit d’un individu A à celle d’un individu B, sans tenir compte de la distance : il suffit de considérer A et B comme des particules, les esprits comme des objets à part entière. Ils ne feraient qu’un, à un moment donné, parce qu’en réalité ils peuvent ne faire qu’un, ne faisaient qu’un au niveau holographique, mais faisant deux au niveau de la réalité physique.
Cela permet également de résoudre un certain nombre d’énigmes de la psychologie. Le professeur Stanislav Grof, par exemple, pense que le paradigme holographique offre un modèle pour la compréhension de beaucoup de phénomènes expérimentés mais considérés comme "embarrassants", constatés chez les individus plongés dans état modifié de la conscience, ce qu’on appelle communément une transe (transe chamanique, par exemple). Dans les années 1950, Grof conduisait une recherche sur la croyance que le LSD constituait un outil psychothérapeutique. Il avait parmi ses patients une femme qui était soudainement convaincue qu’elle avait assumé l’identité d’une femelle d’une espèce de reptile préhistorique. Dans le cours de son hallucination, elle a non seulement donné une description détaillée de l’impression qu’elle avait d’avoir incorporé une telle forme, mais elle a noté que les mâles de l’espèce possédaient une série d’écailles colorées sur le côté de sa tête. Ce qui paru étrange à Grof, c’était que cette femme n’avait aucune connaissance antérieure, aucun intérêt auparavant dans ce domaine. Plus tard, la conversation avec un zoologiste lui confirma que dans une certaine espèce de reptiles, un pan de couleurs sur le côté de la tête joue en effet un important un rôle important dans la parade sexuelle.
L’expérience de cette femme n’est pas unique. Dans le cours de ses recherches, Grof a rencontré d’autres patients régressant et s’identifiant avec d’autres espèces sur l’arbre de l’évolution [20]. Souvent, ces régressions amenaient dans leur description des détails très précis en zoologie. Ces régressions dans le règne animal n’est pas le seul phénomène psychologique qui rencontra Grof. Il y avait aussi des patients qui paraissaient entrer avec le savoir "collectif" [21] de sociétés ou de peuples disparus depuis longtemps. Les personnes en régression avaient subi peu ou pas d’éducation et leur discours devenait soudain très détaillé, très riche en informations, par exemple en décrivant les pratiques funéraires du zoroastrisme ou des scènes de la mythologie hindoue. Dans d’autres catégories d’expériences, les "malades" ont donné des compte-rendus persuasifs de voyages hors du corps (mêmes étapes de la décorporation, détails de ce qu’ils ont vu dans un autre lieu), ils ont fait la preuve d’une capacité de précognition (décrire l’avenir) et ils ont semblé régressé dans une incarnation datant d’une vie précédente. Dans une recherche postérieure, Grof a trouvé la même gamme de phénomènes se manifester dans des procédés thérapeutiques qui n’impliquaient pas l’utilisation de drogues ou de médicaments. L’élément commun à telles expériences semblait être le dépassement de la conscience d’un individu au-delà des frontières l’habituelles de l’ego et/ou des limitations de l’espace-temps. Grof a donné le nom de "transpersonnel" à de telles manifestations. A la fin des années 60, il a aidé a fonder une nouvelle branche de la psychologie appelée "psychologie transpersonelle" et consacrée entièrement à l’étude de ces "manifestations". Bien que l’Association fondée par Grof ait recueillie un groupe rapidement nombreux de professionnels partageant ses opinions, elle n’est pas devenue ne branche reconnue de la psychologie [22].
Pendant des années, aucun autre que Grof n’était capable de donner un mécanisme capable d’expliquer de tels phénomènes. Mais cela a changé avec l’apparition du paradigme holographique. Comme Grof l’a récemment noté, si l’esprit fait en réalité partie d’un continuum, un "labyrinthe" qui est connecté non seulement à chaque autre esprit (qui existe ou qui a existé), mais également à chaque atome, organisme ou la région dans l’immensité de l’espace et du temps lui-même, le fait que l’on soit capable, de temps en temps, de faire des incursions dans le "labyrinthe" et d’avoir des expériences "transpersonnelles" ne semble pas si étrange.
Le paradigme holographique a aussi des implications sur des sciences reconnues (les sciences dures) comme la biologie [23]. Keith Floyd, un psychologue du Virginia Intermont College, a déclaré que : si la réalité concrète n’était qu’une "illusion holographique", on ne pourrait plus dire que le cerveau produit la conscience. Ce serait plutôt la conscience qui fait apparaître le cerveau, aussi bien que le corps… et tout le reste autour que nous interprétons comme une réalité physique [24]. Un tel revirement dans notre conception des structures biologiques a provoqué d’autres déclarations, en particulier les déclarations de chercheurs en médecine, pour qui la compréhension du processus de guérison pourrait aussi être transformée par le paradigme holographique. Si la structure physique apparente du corps n’est que la projection holographique de conscience, il devient clair que chacun de nous est beaucoup plus responsable de notre santé que ne le pense aujourd’hui la médecine. De ce point de vue, les rémissions de maladies censées être mortelles et les guérisons miraculeuses constatées par la médecine (en-dehors des guérisons de Lourdes) seraient en réalité des changements dans la conscience (ou dans l’inconscient) qui changeraient à leur tour l’hologramme du corps. Les effets placebo et nocebo (l’inverse) trouveraient ici toute leur signification.
De nouvelles techniques de guérison pourraient même se baser sur cela, telle que la très controversée "visualisation" et la plus controversée encore "pansémiotique". Pourtant, travailler sur des principes holographiques signifierait que l’on puisse atteindre ce niveau à volonté - ce qui n’est manifestement pas le cas. La pensée pourrait-elle agir sur le corps parce qu’elle se trouve plus près du niveau holographique que le corps lui-même ? Dans ce cas, visualiser certaines images, certaines formes, pourraient effectivement avoir un effet [25]. Dans ce cas aussi, les visions et les expériences impliquant une réalité "non-ordinaire" deviendraient explicables : elles seraient le signe du "glissement" de la réalité physique à la réalité holographique.
Si ce glissement est plus facile ou plus courant au niveau des pensées, l’est-il aussi au niveau des sentiments ? Les sentiments ne sont-ils que des pensées ou sont-ils de l’ordre de la sensation ? Que pensez de l’amour et du fameux "coup de foudre" ? Que pensez du sentiment réciproque d’amour et de cette belle expression, l’âme sœur ? L’amour serait-il ce qui relie les êtres, ce qui relie toute chose ? C’est ce que pensent certains esprits religieux.
Dans son livre Gifts of Unknown Things, le biologiste Lyall Watson décrit sa rencontre avec une femme chaman indonésienne qui exécutait une danse rituelle et qui était capable de faire se volatiliser un bosquet d’arbres entier - en un instant. Watson rapporte comment lui et un autre spectateur stupéfié ont continué à observer la femme, comment elle a fait disparaître les arbres et les a fait réapparaître, comment ils ont disparus de nouveaux, etc. Bien que la science actuelle soit incapable d’expliquer de tels événements, ces expériences deviennent de plus en plus défendables à mesure qu’on découvre la structure "instable" de la réalité physique. Elles deviennent explicables si on considère ces arbres comme des projections holographiques. L’étonnant n’est pas que ces arbres puissent disparaître à la vue (et sans doute au toucher) de la chaman, l’étonnant est que cette disparition soit visible par d’autres. Cela signifie soit que la chaman a modifié les perceptions des spectateurs (elle leur a permis de "voir"), soit que cette réalité physique produite par l’ensemble des cerveaux (holographiques) ne serait véritablement produite que par un seul esprit, ce pourquoi ce qui serait visible pour un seul serait visible pour tous, qu’il s’agisse de la réalité physique ou de la réalité holographique.
Peut-être que notre description et notre vision de la réalité n’est-elle qu’un consensus, de ce qui est et de ce qui n’est pas, formulé et ratifié au niveau de l’inconscient, qu’il soit accepté ou non au niveau conscient. Ce consensus serait visible par tous et matérialisés par tous parce que tous les esprits possédaient le même inconscient, parce qu’ils seraient tous connectés par la partie holographique ou inconsciente de leur cerveau. Cet inconscient pourrait être d’ailleurs du "conscient refoulé consciemment", comme le pensait Sartre, plutôt qu’une "mémoire cachée" constitutive à notre esprit et destinée à rester cachée.
Si la réalité n’était véritablement qu’un consensus, sans aucune nécessité, cela signifierait que les expériences comme celle que nous rapporte Watson ont quelque chose de "banale", d’aussi banale que le passage du facteur. Seulement, nous n’aurions pas "programmé" nos esprits à y croire, nous n’aurions pas laissé la place à cette possibilité dans notre définition de la "réalité physique". La question ne serait donc pas de se demander si cela est possible ou non, à quelles conditions, mais de se demander comment nous avons pu nous "programmer". Le Bouddha pensait que les hommes étaient la propre source de leur malheur - et donc de leur libération. Mais cette croyance n’est valable que si l’homme est véritablement libre, qu’il l’est toujours été. Si l’on s’apercevait au contraire que l’homme avait été "programmé" par quelqu’un ou par quelque chose, comment faudrait-il réagir ? Nous reviendrons sur cette question plus loin.
Dans un univers holographique, il n’y a aucune limite à la manière dont nous pourrions modifier le tissu (web) de la réalité. Peut-être même avons-nous déjà commencé. Pourrions-nous alors dessiner et effacer ce que l’on veut sur cette toile, ou tirerions-nous de ce tissu les images que nous voulons, dans quel cas tirer sur le tissu perturberait le tissu tout entier ? En principe, nous dirions tout est possible. Au niveau de l’homme, ce n’est peut-être pas tout à fait vrai, mais au niveau holographique, ça l’est tout à fait.
Pour l’ethnologue Castaneda, ce tout est possible est applicable à l’homme. Il a pu apprendre pendant ses séjours chez l’indien Yaqui Brujo, surnommé Don Juan, que la magie est notre droit imprescriptible, rien de moins que miraculeux, et que nous avons la capacité de décider de la réalité nous voulons quand nous sommes dans ce qu’on appelle les "rêves" [26]. En effet, même les notions les plus fondamentales (qui nous apparaissent les plus fondamentales) de la réalité deviennent suspectes, car dans un univers holographique, comme Pribram l’a indiqué, on doit voir les événements même les plus aléatoires comme basés sur les principes holographiques et donc déterminés. Le synchronisme serait significatif et toutes les voudraient "dire" quelque chose (comme des signes chez les Anciens). Les événements deviendraient alors semblables à des métaphores (ou à des métonymie). Même un petit bonheur ou un petit malheur exprimerait quelque symétrie sous-jacente. On appellerait aujourd’hui "non significatif" ce qui serait en réalité "peu significatif".
Que la théorie de l’univers holographique de Bohm et le paradigme holographique de Pribram soient un jour accepté par la science ou qu’ils soient laissés à leur funeste sort dans le cimetière des idéalismes, ils ont déjà eu une influence sur la pensée de beaucoup de savants. Même s’il est constaté que le modèle holographique ne fournit pas la meilleure explication des communications instantanées et réciproques entre des particules sous-atomiques, du moins, comme l’a noté par Basil Hiley, un physicien au Birbeck College à Londres, les découvertes d’Aspect indiquent que nous devons nous préparer à considérer des vues radicalement vues sur la réalité - comme la physique quantique en son temps.
**Les rats de MacDougall et les singes de Koshima
Une expérience a été réalisée dans les années 20 par Mac Dougall à Harvard [27]. L’expérience consistait à baigner des rats dans un bain, en leur laissant deux tunnels de sortie, dont l’un était éclairé, donc plus attractif. Il fallut de très nombreuses immersions (jusqu’à 330) pour apprendre aux rats testés à éviter le tunnel lumineux. L’expérience se perpétua sur 32 générations. Une tendance générale fut observée à éviter de plus en plus souvent le tunnel lumineux.
Mais Mac Dougall n’avaient pas testés que des lignées de rats entraînés. Or, les lignées non entraînées évoluaient aussi vite que les lignées entraînées ! L’expérience fut reproduite par Crew de l’université d’Edimbourg. Il observa 18 générations sous voir d’amélioration. Puis l’on s’avisa qu’il avait utilisé des rats de la même souche que ceux de Mac Dougall, et que les scores obtenus au début de son expérience étaient identiques à ceux obtenus par les rats de la dernière génération de l’expérience de Mac Dougall. Pourtant, d’autres générations s’étaient écoulées, les rats n’étaient pas entraînés… S’agirait-il d’une mémoire génétique ?
L’expérience fut testée une troisième fois par Agar à Melbourne. Elle porta sur 54 générations successives et dura 20 ans. La souche de rats n’était pas la même que dans les expériences précédentes. Une tendance marquée à l’amélioration des performances fut observée, dans la lignée entraînée comme dans la lignée témoin non entraînée. Cela signifie que les rats continuaient d’apprendre indépendamment de la souche utilisée. L’information ne passait donc pas par voie génétique. Par où alors ?
Dans de nombreuses autres expériences, les chercheurs ont pu constater un phénomène d’apprentissage qui ne passait ni par voie génétique ni par voie culturelle. On peut en donner un exemple avec les singes de l’île japonaise Koshima.
Les scientifiques qui les étudiaient dans les années 50 avaient commencé à les nourrir avec des patates douces. Elles étaient déversées par chargements entiers sur la plage. Les singes adoraient les patates mais n’appréciaient guère de les recevoir souillées de sable. Cruel dilemme ! Il fut résolut par une jeune femelle de 18 mois prénommée Imo. Elle découvrit un jour qu’il suffisait de les plonger dans l’eau de mer pour qu’elles ressortent nettoyées. Elle apprit la technique à sa mère, à ses camarades de jeu, et bientôt toute la colonie sut préparer les patates douces. Jusque là rien de très extraordinaire. La suite de l’histoire est beaucoup plus intéressante, mais également moins connue parce que les chercheurs hésitèrent longtemps avant de publier ces observations qui allaient trop à l’encontre des idées reçues en biologie. Il apparut qu’au même moment, sur d’autres îles, des troupes de singes se mirent " spontanément " à faire usage de cette même technique qui leur était jusque là totalement inconnue ! Cet apprentissage se fit bien sûr sans qu’aucun lien physique ne fût établi entre les différentes colonies [28].
De ces expériences, on peut tirer trois explications possibles :
- La mémoire passe de manière génétique mais les gènes communiquent entre eux de manière non génétique : cette explication est contradictoire, elle doit donc être éliminée.
- La mémoire passe de manière culturelle, mais les animaux ont des moyens pour communiquer à distance, de manière télépathique peut-être : cela appuierait l’idée de l’inconscient collectif imaginé par Jung.
- La mémoire n’a pas besoin de passer d’un individu à l’autre, car la séparation entre les individus est illusoire, il ne s’agit, au mieux, que d’une distance, de même que mon pied est distant de mon cerveau et qu’il faut un peu près une seconde pour que la voiture que je vois arrivé me fasse réagir en sautant sur le côté : l’image passe d’abord par l’œil, puis par le cerveau, puis par les nerfs avant de faire se mouvoir des muscles.
Dans le cadre de cette dernière hypothèse, il faudrait bien préciser que l’origine de l’apprentissage peut se trouver dans n’importe quel individu ou dans n’importe quel groupe d’individus. L’espèce générale de rats dominerait ici sur les différentes lignées existantes. De même, l’espèce générale de l’homme dominerait sur les différents peuples. Les espèces se comporteraient ici à l’image des "Idées" telles que l’avaient imaginé Platon ou Schopenhauer [29]. L’homme ne travaillerait jamais pour lui-même mais pour son espèce, même s’il n’en a pas conscience. Kant avait traduit ceci au niveau de la moralité, expliquant qu’il fallait se toujours comporter comme l’espèce entière, que son comportement soit valable pour n’importe qui, indépendamment du contexte, sous-entendu : pour que la moralité reste valable pour tous, en tout lieu et en tout moment [30].
De même, les sages de l’Antiquité chinoise préconisaient un comportement paradoxale au nom de ce qu’ils appelaient "Tao" : la non-action. La non-action consistait à ne pas agir, à ne pas faire (non-violence), à ne pas parler (silence), à ne pas aider aussi. Les sages n’interféraient pas avec la vie du peuple chinois, si ce n’est de manière épisodique. Mais les sages, par un moyen qui était inconnu aux autres, savaient influencer le peuple chinois, leur porter bonheur. Comment ? En suivant la voie du Tao. Le Tao était donc quelque chose capable d’influencer l’ensemble de l’humanité, voire au-delà. Les sages étaient un exemple pour le peuple, mais étrangement ils n’avaient pas besoin de se montrer ou d’être compris pour être un exemple et avoir l’influence de n’importe quel modèle. Leur influence n’était ni génétique ni culturelle. Elle n’était pas non plus magique, aux dires des taoïstes. Elle était quoi ? [31]
Il ne faut peut-être pas voir des "forces" là où il n’y a qu’un fonctionnement. On imagine des "forces" comme on imagine des "causes", parce que l’on pense de façon linéaire. Il faut donc trouver une logique transversale ou géométrique, une logique qui non fasse changer de paradigme, comme le relief est une évolution par rapport à la peinture en deux dimensions. Cette logique par espèces peut être considérée comme une logique archétypale (selon les archétypes de Jung). Elle pourrait permettre d’expliquer la synchronicité de certaines découvertes. Par exemple [32] :
Les récentes analyses d’ADN de l’homme de Mungo découvert en 1974 dans l’Est de l’Australie, ont révélé qu’il a vécu il y a environ 60 000 ans et qu’il descendait d’un Homo sapiens chinois, baptisé gracile, lequel venait lui-même d’un Homo erectus issu d’Afrique. Or des crânes de ces précurseurs d’Homo sapiens vieux de 250 000 à 100 000 ans ont été découvertes dans diverses régions de Chine, ce qui relance le débat sur l’origine de l’homme moderne : selon Wu Xinzhi, de l’Institut de paléontologie des vertébrés de Bejing, l’évolution de l’Homo erectus vers l’Homo sapiens aurait eu lieu simultanément en Afrique, et dans le Sud-Ouest de la Chine, selon deux modes d’évolutions convergentes.
Spatialement parlant, la disparition progressive de la distance, la distillation de l’acquis chez les individus, peut-être considérée soit :
- comme une illusion de l’espace ; les objets et les informations ne se déplaceraient pas réellement dans l’espace mais dans autre chose ; cet autre chose conditionnerait à la fois la fameuse distance (le temps que prend l’information pour se distiller) et la répartition de l’information parmi les individus.
- comme la transmission d’une information dans une espace supérieure où la notion de distance est différente, voire abolie, ce qui serait le cas si l’on faisait intervenir une autre dimension, la cinquième dimension.
D’autres questions se posent que nous n’avons pas résolu : pourquoi la communication interindividuelle se restreint-elle à l’espèce à laquelle elle appartient ? La communication interindividuelle concerne-t-elle d’autres choses que des acquis, des émotions, des envies, des opinions ou des façons de voire le monde par exemple ? Dans ce cas, pourrait-elle concerner les différents d’objets ? Les planètes peuvent-elles être considérées comme une "espèce" à part entière ? Le mot de catégorie est-il synonyme d’espèce ? Les idées, les modes et les langues seraient-ils sensible à cette forme de communication. Cela expliquerait peut-être la facilité avec laquelle les jeunes enfants apprennent la langue fort complexe du pays où ils naissent, alors qu’il n’y a pas d’héritage génétique de la langue.
On trouvera matière à réfléchir en prenant conscience que les espèces et la mémoire ne sont pas les seuls choses à fonctionner de manière holographique, à être éclairées par cette analogie. L’histoire aussi, par exemple, ne suit pas une logique linéaire (voir nos articles sur les coïncidences dans l’histoire).
___
Le monde est étrange, vous ne trouvez pas ?