La théorie du seuil d’évolution

mercredi 5 septembre 2012
par  Neimad
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Je voudrais vous présenter une théorie. A quoi ressemble l’évolution du monde et du vivant du point de vue des probabilités ?



 De la création du monde aux planètes


Selon la théorie cosmogonique communément admise dans les milieux scientifiques, l’Univers est né d’un Big Bang, d’un léger déséquilibre entre la quantité de matière et d’anti-matière ou bien d’une probabilité d’exister (cf. la théorie M défendue notamment pas le physicien Stephen Hawking). Un plus d’antimatière, et l’Univers se serait anéanti dans les meilleures secondes, il ne resterait pas assez de matière pour faire un monde. Un peu moins de gravité ou d’une autre force fondamentale, et l’Univers serait resté au stade de magma.

Selon le physicien Hubert Reeves (dans Poussières d’étoiles), les lois de la physique sont extraordinaires : elles produisent d’abord des atomes d’hélium et d’hydrogène qui constitueront les étoiles ; les étoiles fabriqueront dans leur sein les autres atomes qui seront nécessaires aux êtres vivants, elles exploseront en supernova et ce seront les "poussières d’étoiles" qui constitueront les planètes.

Les étoiles simples et doubles sont très nombreuses dans l’Univers, et autour de ces étoiles tournent souvent de nombreuses planètes, comme le montre la découverte des exoplanètes (quand on détecte une planète autour d’une étoile, on peut être quasiment sûr d’en détecter d’autres). En réalité, notre système solaire n’a rien d’unique.

On peut même dire que le système solaire avec planète est la norme vers laquelle tend l’univers et que toutes les autres cas (naines blanches, trous noirs, supernova, étoile à neutrons, étoiles triples…) suivent une courbe de Gauss qui explore toutes les autres possibilités, toutes les variations possibles autour de ce modèle.

 Des planètes aux êtres vivants


L’eau est un des éléments les plus courants de l’Univers : on en trouve sur la Terre, sur Mars, sur les lunes de Jupiter et de Saturne (Titan, Europe, Encélade)…

Sur l’ensemble des planètes existant dans l’Univers, un petit nombre de planètes (1% fait déjà des milliards de milliards de planètes…) se situent dans la zone habitable, à une distance de leur étoile suffisante pour que l’eau soit à l’état liquide. Celles qui sont trop proches seront entièrement recouvertes de gaz, celles qui sont trop loin seront des planètes de glace, comme Neptune.

Sur l’ensemble des planètes dans la zone habitable, un grand nombre ne possède pas les conditions requises pour faire émerger la vie, comme Mars, qui est trop petite pour garder son atmosphère par exemple. D’autres n’auront pas de source d’énergie suffisante (énergie solaire, activité tectonique, marées lunaires…), d’autres seront recouvertes d’une atmosphère impropres à la vie (en fonction de sa composition, de son opacité ou d’un effet de serre trop important), d’autres encore auront une rotation trop lente ou trop rapide, etc.

Sur l’ensemble des planètes qui possèdent les conditions pour que la vie émerge , seul un certain nombre survivra aux catastrophes naturelles, comme les tempêtes solaires, les explosions de supernova, les météorites. A cause des météorites, il y a déjà eu plusieurs extensions massives d’animaux (jusqu’à 95%) dans l’histoire de la vie sur Terre (la météorite qui a détruit les dinosaures n’aura détruit que 65% de la vie sur Terre).

La vie est comme une génération de têtards. Seul un certain nombre deviendront grenouilles.



 Des êtres vivants à l’homme


Sur l’ensemble des êtres vivants apparus sur Terre, un certain nombre d’espèces ont survécu (ce que Darwin a appelé la sélection naturelle) parce qu’ils étaient mieux adaptés à leur environnement, parce qu’ils avaient les meilleures capacités pour survivre et se reproduire.

Il y a 4 millions d’années, le genre homo est apparu et s’est diversifié (selon d’autres anthropologues, plusieurs espèces humaines sont apparues en même temps en Afrique, en Asie…) : homo habilis, homo erectus, australopithèques, homme de Néandertal, Homo Sapiens Sapiens…

Il est difficile de retrouver la trace de tous les stades intermédiaires des espèces. Il est probable que de nombreuses mutations se produisent ne même temps sur un temps très court, sans doute favorisé par la taille d’une population (cf. Stephen G. Gould). C’est ce que l’on pourrait appeler des "sauts évolutifs". Après ces moments d’accélération, les espèces se stabilisent et restent inchangées pendant un temps relativement long (ce que l’on observe aujourd’hui).

L’homme de Néandertal aura été notre concurrent. Il avait une boîte cranienne plus importante, il façonnait des objets, il était physiquement plus fort que l’Homo Sapiens Sapiens. Pourquoi a-t-il disparu ? Pour certains, les deux espèces se seraient affrontées. Pour d’autres, notre espèce se serait simplement reproduit plus vite et aurait fini par absorber l’Homo Néandertalis.



 De la vie ailleurs dans l’Univers ?


Il n’est pas impossible que sur d’autres planètes aux conditions de vie similaire à la nôtre, d’autres espèces vivantes aient survécu suffisamment longtemps pour évoluer. Il n’y a pour l’instant aucun moyen de rentrer en communication avec elle, et nous n’avons pas non plus détecté de message provenant de l’espace. Les OVNI sont peut-êtres des légendes, des avions furtifs américains, la manifestation visuelle de la paranoïa qui s’était emparée du monde occidental pendant la guerre froide…

Pourtant, si d’autres espèces avaient pu évoluer comme nous, elles devraient bénéficier de la même vitesse de développement apportée par la science et la technologique. Comme on peut le voir depuis 5000 ans ou même depuis seulement 200 ans, la technologie se développe de manière exponentielle, elle donne l’impression que l’histoire s’accélère. A quel niveau de technologie serait une espèce qui aurait découvert la roue, la poudre et l’imprimerie il y a 50 000 ans ?

Regardons seulement la multiplication de la puissance informatique : selon la "loi de Moore", le nombre de transistors sur une puce double tous les 2 ans. Il y aura sans doute un changement de paradigme avec l’ordinateur quantique, mais les recherches actuelles tendent à améliorer encore les performances et les capacités des ordinateurs…

Or, le Soleil est une étoile jeune. Il existe des systèmes solaires beaucoup plus ancien que le nôtre. Il suffit de voir le ciel pour s’en convaincre : les étoiles que nous voyons la nuit se situent à des dizaines voire des centaines d’années-lumières, ce qui signifie qu’elles n’existent plus aujourd’hui. Des civilisations ont peu grandir, s’épanouir et s’éteindre des millions d’années avant nous ailleurs dans l’Univers.

En prenant en compte la grandeur et l’ancienneté de l’Univers, on en vient à se poser la question pourquoi des civilisations plus évoluées ne nous ont pas contacté depuis longtemps, pourquoi nous ne détectons aucune message dans ce sens, pourquoi nous n’en voyons pas la trace comme dans 2001 l’Odyssée de l’espace  ?

A cette question, plusieurs réponses sont possibles :

  1. Notre système solaire se trouve dans une branche de la galaxie (dans le bras d’Orion). Si j’étais un extra-terrestre à la recherche de la vie, j’irai sans doute au coeur de la galaxie où se trouve le plus grand nombre d’étoiles au mètre carré.
  2. Des civilisations se sont développées dans d’autres galaxies mais n’ont pas encore fini d’explorer la leur, et même s’ils devaient le faire, ils commenceraient sans doute par la galaxie d’Andromède, notre voisine et notre grande soeur.
  3. Un empire galactique existe, il est simplement invisible à nos yeux. Ce serait la fameuse matière noire, qui représenterait 90% de la masse de l’Univers. Un écran noir nous empêcherait simplement de voir de cet empire. Après tout, c’est peut-être qui sommes invisibles ?
  4. Les OVNI sont des extra-terrestres, mais dans ce cas, pourquoi les astronomes professionnels et amateurs de part le monde ne les détectent-ils pas ? Pourquoi ne prennent-ils pas contact avec nous ?
  5. La cinquième réponse découle du fonctionnement de l’ensemble du processus décrit plus haut. C’est ce que j’appelle la théorie du seuil d’évolution

 La théorie du seuil d’évolution


Des soleils aux planètes, des planètes aux êtres vivants et des êtres vivants à l’homme, nous avons là trois étapes dont les chances de succès sont de plus en plus mince.

A la différence du règne animal, l’homme ne s’adapte plus à son environnement, il l’adapte au contraire à ses besoins. Il est le seul capable de le comprendre et de le modifier. Son niveau technologique lui permet aujourd’hui de s’auto-détruire et le reste la biosphère avec lui, que ce soit au moyen d’un hiver nucléaire qui cacherait le ciel et irradierait la Terre pendant des millions d’années, par une catastrophe écologique qui entraînerait une effet de serre incontrôlable (comme sur Vénus), ou par la pollution de l’ensemble de notre environnement par des produits chimiques.

Il s’agit là de la conséquence du pouvoir dont dispose l’homme de modifier son environnement, du pouvoir que lui confère la technologie. On peut supposer que d’autres civilisations technologiquement avancée ont acquis le même pouvoir sur leur planète, la même responsabilité, et qu’elles ont aussi risqué de s’auto-détruire. Il s’agit d’un d’un nouveau seuil d’évolution. Certains passeront le seuil, en développement une technologie verte, en symbiose avec leur environnement, ou en s’enfuyant vers d’autres planètes…

Si l’on suit le mouvement d’ensemble, les probabilités pour passer d’une étape à une autre sont extrêmement faibles, c’est-à-dire que nous avons beaucoup plus de chances de nous auto-détruire que de passer le seuil.

Il existe cependant une chance de succès. Une faible probabilité n’est pas une impossibilité. Cet article doit aider l’homme à prendre conscience de la situation actuelle où nous nous trouvons [1].


___

Le monde est étrange, vous ne trouvez pas ?



[1] Dans ce cadre, il n’est pas interdit de supposer que des civilisations extra-terrestres existent ou ont existé ailleurs dans l’Univers, qu’elles n’ont pas passé ce fameux seuil évolutif et que certaines l’ayant passé, ne souhaitent pas intervenir sur notre évolution. Notre histoire nous montre que la rencontre de deux civilisations pouvait avoir des effets dévastateurs, même de manière non intentionnelle (par exemple les maladies transmises aux Indiens par les Européens, l’introduction de lapins en Australie, etc.). Une civilisation plus avancée que la nôtre pourrait très bien tenir compte de cette possibilité et interdire l’accès aux planètes qui n’ont pas passé cette "épreuve" de maîtrise de la technologie, des écosystèmes et du "toujours plus de pouvoir".


3 votes

Commentaires

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jeudi 20 septembre 2012 à 11h20 - par  Neimad

J’ai l’impression qu’on s’écarte du sujet. Quoique… B-)

Au début du 20e siècle, plusieurs physiciens, dont Einstein, repris par Hubert Reeves, repris par les frères Bodganov dans leur dernier livre, prenait conscience que les quatre constantes de la physique (la force électromagnétique, la force faible, la force forte et la gravité) conditionnaient la forme de l’Univers.

Prenons l’exemple de la force électromagnétique. Elle est la "colle" qui relie les particules entre elles dans les atomes. Son intensité est égale à 10 puissance -2 (1/137 ou plus précisément 1/137,035999…). Un nombre légèrement différent aurait interdit la formation des atomes et donc de la matière, des planètes et de la vie…

Le Big Bang n’est pas seulement la création de l’Univers matériel, mais également celui du temps, de l’espace et des constantes de la physique qui permettent à la matière de s’organiser et de prendre la forme que l’on connaît aujourd’hui.

Si Dieu n’existe pas, on peut supposer que les probabilités pour que les constantes de la physique existent avec ces mesures-là sont très faibles. Il pourrait exister dès lors une myriade d’Univers parallèles dans lesquels ne se seront pas formés d’atomes, qui n’auront même pas connus de Big Bang, qui, potentiellement, n’existeraient même pas, puisqu’il n’y aurait ni temps ni espace.

Si Dieu existe, il serait très différent du Dieu personnel des religions. Ce serait plutôt le Dieu des philosophes (Leibniz, Spinoza…), un Dieu qui se contente de créer l’Univers à l’origine des temps et qui règle la machine de manière à ne plus devoir intervenir. Voltaire donnait l’image d’un Dieu qui poussait le navire sur l’océan et le regardait partir…

Mais nous nous écartons de notre sujet :-P : la possibilité pour notre espèce de s’éteindre si elle ne se rend pas compte de sa fragilité dans l’Univers…

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mardi 11 septembre 2012 à 23h23 - par  ianop

De deux choses l’une :

  • Ou la vie fourmille dans l’univers, et dans ce cas tout est "normal" (selon nos critères humains).
  • Ou nous sommes "seuls" dans l’univers, et dans ce cas rien n’est "normal".

Il y a un troisième cas.

  • Nous nous "croyons" seuls dans l’univers parce que nos représentations nous conditionnent depuis des millénaires dans le sens d’une "séparation" de la conscience d’avec son environnement (que nous appelons très vulgairement "matière").
    Cette séparation de l’être et de son origine (que l’on peut assimiler à une "chute") peut effectivement entraîner à plus ou moins long terme la disparition de l’espèce humaine.
    Nous nous croirions "seuls" tout simplement parce que nos supra récepteurs seraient en panne.

Il y a donc, qu’on le veuille ou nous, un problème religieux derrière tout ça, et le fait de le nier aggrave encore notre cas.

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mardi 11 septembre 2012 à 11h40 - par  Neimad

Merci ianop pour votre commentaire. En 1971, dans un Congrès consacré au programme SETI, les physiciens Drake et Sagan essayèrent de calculer les probabilités pour qu’une civilisation ait évolué au point de pouvoir d’envoyer des ondes radio dans l’espace, ce qu’on appelle la "formule de Drake" (cf. C.Sagan, Communication with Extraterrestrial Intelligence (CETI), MIT Press, 1973.). Selon l’hypothèse de départ, le résultat était d’un million de civilisations dans la Voie lactée, plus tard réévaluée à un nombre entre 1 et 600.

Le biopaléontologue Peter Ward, quant à lui, considère que la vie sous forme microbienne est très courante dans l’univers, mais que les formes de vie complexes sont rares (cf. Peter Ward et Donald Brownlee, Rare Earth, Springler, 2000). Certains astrophysiciens (Benjamin Zuckerman et James Trefil) considère que la probabilité N d’une vie intelligente ailleurs dans l’univers est même égale à 1, ce qui rejoint le dogme chrétien (et celui des créationnistes).

Selon d’autres astrophysiciens comme David Grinspoon, il faut être prudent dans ces estimations, car nous raisonnons à partir de la seule forme de vie que nous connaissons, la nôtre (à partir du carbone, de l’eau et de l’ADN protéinique).

En attendant de découvrir d’autres formes de vie ailleurs dans l’univers, nous pouvons seulement admettre notre ignorance quant à la probabilité N d’une autre civilisation ailleurs dans l’Univers. Cet article avait simplement pour but de réfléchir au processus général qui amène N à diminuer à chaque étape.

Il serait présomptueux de croire, à mon sens, que notre espèce survivra à tout, pour l’éternité, maintenant qu’elle est apparue. Nous sommes au sommet de l’échelle de l’évolution, comme les dinosaures avant nous, et potentiellement les plus fragiles en cas de catastrophe.

Serions-nous capable de renverser le réchauffement climatique par exemple, en modifiant notre environnement (OGM) ou notre comportement (l’écologie) ? Cela semble difficile aujourd’hui. Il est plus probable que nous épuiserions toutes les ressources naturelles, que nous consommerions toutes les formes de vie, avant de nous éteindre, si bien que nous serions nous-mêmes responsables de la destruction de notre espèce mais aussi des animaux, des oiseaux, des poissons…

Le seuil d’évolution sur lequel nous buttons aujourd’hui n’est peut-être pas le dernier dans les seuils d’évolution possibles d’une civilisation (après la maîtrise du feu, la maîtrise de l’’environnement, l’exploration des planètes, des systèmes solaires, des galaxies, etc.). Cela laisse supposer que la probabilité de passer le seuil d’évolution actuel est supérieur à 1. Cela donne de l’espoir…

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lundi 10 septembre 2012 à 09h53 - par  ianop

Votre tour d’horizon est fidèle à ce qu’on peut lire aujourd’hui dans tous les bons livres de vulgarisation scientifique.
Mais votre théorie ("les chances infimes de ne pas s’autodétruire"), n’est pour l’instant que formulée.
Et si vous développiez ?

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