L’Argentine nationalise le groupe pétrolier espagnol YPF

vendredi 20 avril 2012

Lundi 16 avril, la président de l’Argentine, Mme Cristina Kirchner, a déclaré la nationalisation d’YPF, la filière du groupe espagnol Repsol, qui exploitait le pétrole dans son pays. L’année dernière, le prix du pétrole avait augmenté de 110%.

L’Espagne brandit des représailles économiques et diplomatiques imprécises. Si la balance commerciale est en effet en faveur des Espagnols (Ils achètent 2,01 milliards de produits argentins, contre 1 milliard dans l’autre sens), de nombreuses sociétés espagnoles se trouvent encore en Argentine et ramènent des bénéfices : Gas Natural (27 millions d’euros en 2011), Telefonica de Argentina (3 milliards) les banques Santander (5,36% de leurs bénéfices en Argentine), BBVA (5,22%)… [1]


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Vendredi 20 avril  : le Parlement européen menace de conséquences sur le système de préférences généralisées (SPG) dont l’Argentine bénéficie auprès de l’UE. Cela pourrait également remettre en cause l’alliance avec Mercosur [2] dont fait partie ce pays.

L’Espagne se trouve ainsi sous la double tourmente d’une crise économique et d’une expropriation. D’un certain point de vue, l’Argentine pourrait être accusée de profiter de la faiblesse de l’Espagne pour récupérer la maîtrise de l’énergie dans son pays (et les gains afférents à l’exploitation du pétrole). Bachar el-Assad ne fait-il pas de même, en profitant de la faiblesse de l’Union européenne pour réprimer le soulèvement de son peuple ?

D’un autre point de vue, ce mouvement fait partie d’un processus de nationalisation des secteurs stratégiques dans les pays d’Amérique du Sud (le pétrole, l’électricité et les télécommunications). L’Argentine est en effet le troisième pays d’Amérique du sud à nationaliser ses hydrocarbures, après le Vénézuela [3] et la Bolivie [4] en 2006. En réalité, il s’agissait d’une augmentation des parts détenues par l’Etat, de 20% à 80%, qui devenait ainsi l’actionnaire majoritaire. Elle passera à 51% dans le cas d’YPF (contre 42,6%) auparavant [5].


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Les élections qui ont amené au pouvoir Hugo Chavez, Evo Morales et Cristina Kirchner ont pour point commun de rompre avec les politiques précédentes qui étaient souvent liées aux intérêts des Etats-Unis [6].

Certaines analyses, comme celles de l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), donnent un poids particulier à ces évènements : ils signifieraient un changement des rapports de force entre les pays du Sud et les pays du Nord [7].

De manière plus générale, le contexte de crise économique amène des tensions entre les pays, en particulier sur le secteur de l’énergie [8]. En espérant que cela ne provoque pas d’autres guerres…

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Ce monde est à nous, changeons-le !


[1] Voir http://www.lefigaro.fr/societes/201…

[2] Le Mercosur est un accord économique et politique entre l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay.

[3] Les groupes pétroliers concernés étaient le groupe français Total et l’italien ENI.

[4] Les sociétés concernaient étaient Total (France), Repsol (Espagne) - déjà - , Petrobras (Brésil), British Petroleum (Grande-Bretagne) et Vintage (Etats-Unis).

[5] Voir http://www.lamontagne.fr/france-mon…

[6] La politique des Etats d’Amérique du Sud et celle de ses dictateurs-présidents est liée à la guerre froide et à aux luttes de pouvoir entre les Etats-Unis d’un côté et l’URSS de l’autre. L’adhésion au communisme peut être considéré comme une forme de résistance contre l’influence des Etats-Unis, comme ce fut le cas à Cuba.

[7] Voir http://leplus.nouvelobs.com/contrib…

[8] La transition vers énergies renouvelables serait un bien non seulement pour la planète, mais aussi pour la politique extérieur des pays. Mais cette transformation se trouve retardée par d’autres urgences : l’augmentation du coût de la vie, le chômage, la dette…




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